Homogénéité et diversité des régimes parlementaires en Europe

 

 

Moins large que la notion de système mais plus ample que la notion de constitution la notion de régime politique recouvre selon G Burdeau « l’ensemble des règles ou pratiques selon lesquelles dans un pays donné les hommes sont gouvernés».  De longue tradition l’on s’efforce de classer les régimes politiques par rapport aux conditions d’exercice des grandes fonctions étatiques : oligarchie, démocratie, tyrannie pour Platon et monarchie, aristocratie ou polities pour Aristote.

Le régime parlementaire est l’une des formes d’exercice de la démocratie libérale en ce sens qu’il découle du principe de séparation des pouvoirs. Il correspond à la première et la plus simple distinction dans l’exercice des régimes politiques, celle entre régime parlementaire et régime présidentiel. Le régime parlementaire est représenté en Europe par des pays aussi divers que l’Espagne, la Grèce le Royaume uni, la Belgique et l’Italie. On laissera de coté le cas particulier et complexe de la France qui, hormis les périodes de cohabitation durant lesquelles il peut s’apparenter au régime parlementaire, correspond à un régime semi-présidentiel selon les modalités définies par Maurice Duverger. Le régime semi- présidentiel présentant un exécutif bicéphale te un parlement révocable.

On entend comme définition du régime parlementaire la responsabilité du gouvernement devant le parlement.

 

Quelles sont alors les origines du régime parlementaire en Europe ? Comment cherchent-ils à limiter le pouvoir ? En quoi régime et système interagissent-ils et permettent-ils de mieux comprendre la diversité des régimes parlementaires européens ?

 

Les régimes parlementaires européens empruntent à une même tradition, c’est-à-dire qu’ils ont une histoire commune et se fondent sur les mêmes principes, mais leur application dans un ordre national prend des formes très diverses.

 

 

I. LES REGIMES PARLEMENTAIRES d’EUROPE EMPRUNTENT A UNE MEME TRADITION

 

A. L’instauration du régime parlementaire a été une réponse aux excès du pouvoir absolu

 

1. Par-delà la diversité des histoires nationales, l’instauration du régime parlementaire a cherché à limiter le pouvoir absolu

Une remise en cause de l’arbitraire du pouvoir royal

La mise en place du parlementarisme correspond à une victoire sur l’absolutisme. L e régime parlementaire, écrivait René Capitant en 1933, correspond à une phase du grand conflit des temps modernes opposant le monarque à l’assemblée. Dans ce grand conflit les pouvoirs du monarque n’ont cessé de diminuer au profit de l’assemblée qui conquérait de nouvelles prérogatives. Ainsi la Monarchie absolue s’est dégradée en Monarchie limitée par la  séparation des pouvoirs.  A cet égard l’exemple Britannique est significatif. La conquête normande ayant pour effet de liguer contre un pouvoir royal  la noblesse et la bourgeoisie locale le monarque dut accorder en 1215  « une grande charte » marquant son renoncement à toute forme d’absolutisme. La montée du parlementarisme est consacrée en 1869  par le « bill of rights », le roi perd le privilège de légiférer  seul. Puis peu à peu le pouvoir ministériel s’émancipa du pouvoir royal et dès le début du XIXe le chef du gouvernement préféra se retirer de lui-même dès lors que les Communes refusaient de le soutenir. Dans la même esprit de limiter le pouvoir l’installation du régime parlementaire s’est faite en voulant éviter de commettre les erreurs du passé.

 

2. A l’issue de la II eme guerre mondiale les états vaincus, l’Allemagne et l’ Italie, s’interrogent sur la nature du régime à mettre en place. Il allait de soi que l’Allemagne de l’Ouest devait se donner un régime démocratique                     

Ce fut le régime parlementaire. Il fallait aussi qu’aucun organe exécutif ne puisse arguer de l’élection populaire pour se hisser au-dessus des représentants du peuple voire au-dessus des lois. La volonté de limiter et contrôler le pouvoir  explique l’homogénéité du rôle assigné au chef de l’état selon la fameuse expression : « il inaugure les chrysanthèmes »

 

 

B. Quelles sont les composantes communes du régimes parlementaires et ses fondements ?

 

1. Pour ce qui concerne le chef de l’état, on note :

L’irresponsabilité du chef de l’état dont les prérogatives sont assurées par le gouvernement au travers du contreseing

Le chef de l’état choisit le Président du conseil qui devra être investi par les assemblées.

Il nomme les hauts fonctionnaires aux principaux emplois publics, il est le commandant en chef des armées il promulgue les lois ratifie les traités, exerce le droit de grâce.

En fait, il exerce surtout une fonction symbolique de garant des institutions de la permanence et de l’unité de l’état.

 

2) Pour ce qui concerne le cabinet ministériel :

La responsabilité politique du gouvernement est la condition impérative pour fonder le régime parlementaire. Elle est commune à tout régime se définissant comme « parlementaire » et marque le contrôle de l’exercice du pouvoir par la chambre détentrice de la souveraineté populaire.

Enfin la dissolution de la chambre par le chef de l’état ou le premier ministre est fondamentale, elle favorise la transposition des alliances électorales sur le plan parlementaire, elle contribue aussi à la bipolarisation de la vie politique mais surtout à la confection de la majorité par les électeurs.

En fin de compte les régimes parlementaires européens convergent lorsque l’on analyse  les motivations ayant conduit à son instauration ou les fondements du régime, toutefois les détails du régime et son fonctionnement laissent entrevoir de profondes divergences.

 

II. Le fonctionnement du régime parlementaire nous étonne par sa diversité

 

A. le droit constitutionnel conditionne le fonctionnement du régime parlementaire

 

1. Les régimes parlementaires se fondent sur des constitutions don la singularité s’explique par le contexte de leur mise en place.

Il existe une première distinction entre common law et droit  romain germanique. On peut rappeler que le royaume uni n’a pas de constitution écrite, il se situe dans la tradition de la common law non écrite, plus porté sur le contrat, qui se réfère simplement à quelques grands actes votés par les communes. Les pays se référant au droit romain germanique quant à eux sont plus portés sur la loi.

Les choix constitutionnels permettent de distinguer deux régimes parlementaires :

Le régime parlementaire dualiste définit la double responsabilité du Premier ministre devant le parlement t le chef de l’état. Ce gouvernement fait la liaison entre le gouvernement et l’assemblée, le chef de l’état est irresponsable mais non dénué de pouvoirs.

Le régime parlementaire moniste correspond à la forme classique du régime parlementaire, celle vers quoi s’orientent les régimes dualistes lorsque le chef de l’état perd la réalité du pouvoir au profit du chef du gouvernement. Par exemple la constitution suédoise de 1975 est la plus moniste de toutes dans la mesure ou le chef de l’état n’exerce qu’un rôle symbolique sans prétendre faire partie du pouvoir exécutif, il revient au président du riksag de désigner le chef du gouvernement après consultation des partis.

 

2. Le parlementarisme rationalisé constitue la deuxième variante du régime parlementaire.

 

L’expression s’applique aux régimes parlementaires issus de constitutions dont les auteurs ont cherché à pallier les insuffisances du système de partis à l’aide de mécanismes institutionnels. La plupart des systèmes politiques des pays d’Europe continentale en témoignent sous plusieurs versions. Dans certains cas l’ effort de rationalisation s’est appliqué au processus législatif, ainsi en Italie  la décentralisation du pouvoir  d’élaboration et d’adoption des lois a prévu des commissions parlementaires, les « leggire », tout comme les décrets-lis en Espagne.

Dans d’autres cas il s’est agi d’encadrer la mise en œuvre de la responsabilité du gouvernement comme le fait l’article 67 de la loi fondamentale  allemande.

Les histoires constitutionnelles singularisent les régimes parlementaires européens tout comme les  pratiques politiques.

 

B. La multiplicité des pratiques politiques façonne les régimes parlementaires européens.

 

1. Le jeu électoral et partisan

 

Il découle bien sûr du mode de scrutin choisi. En Angleterre, le scrutin uninominal majoritaire à un tour a eu pour conséquence de scinder la représentation politique en deux principaux partis. Ce mode de scrutin oblige les 2 grands rivaux à porter leurs efforts sur la  conquête de la clientèle électorale du centre. En Allemagne ou le scrutin est techniquement proportionnel, mais politiquement majoritaire (chaque électeur choisit un candidat et une liste de parti) une logique de négociation au sein des coalitions s’impose. Partout, l’offre politique a cependant une forte prétention à se réduire en réponse au désintéressement croissant des citoyens pour le politique. La bipolarisation devient davantage la norme en vigueur comme en atteste la création de l’UMP. 

D’autre part, il est notoire que de nos jours, le rôle des parlements nationaux a tendance à tomber en décrépitude à cause des Actes européens. Dans le cadre normatif de l’Union européenne, l’homogénéisation se réalise plus par le droit que par le politique. Le député qui voit son pouvoir d’initiative diminué en est réduit à « faire du terrain » dans sa circonscription.

 

2. Le jeu parlementaire

 

Il dépend lui aussi des règles constatées. En Angleterre, la discipline qui régit chaque parti réduit à peu de choses l’action des parlementaires. Le cabinet fait passer dans les faits le projet électoral qui lui a permis de  prendre le pouvoir et l’opposition saisit chaque occasion pour dénoncer l’action gouvernementale. Mais à l’intérieur de chaque organisation  partisane la vie politique subsiste, la compétition se déroule entre représentation des différentes tendances ou des multiples groupes organisés.

Après la seconde guerre mondiale, une tendance lourde des régimes parlementaires européens est la diminution du pouvoir législatif  au profit de l’Exécutif qui assoit sa puissance renforcée sur la nouvelle personnalisation du pouvoir. Elle apparaît   plus ou moins marquée selon les pays. Ainsi, en Grande-Bretagne, Churchill contribue à « présidentialiser » la fonction de premier ministre, de même en Allemagne , le rôle prépondérant du Chancelier est établi dans la formule « An den Kanzler kommt es an »( tout repose sur le Chancelier). Dans certains cas,  Le Parlement est devenu « une chambre d’enregistrement » tant l’autonomie législative s’est réduite.

 

Conclusion

Si les régimes parlementaires d’Europe ont des origines et des fondements communs, leur mise en œuvre fait apparaître de profondes divergences. Il convient de reporter le débat sur l’attribution du pouvoir et le fait majoritaire puisque la distinction entre régime parlementaire et régime présidentiel n’est pas assez pertinente pour rendre compte de la diversité des situations concrètes.

 

 

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