Le développement des Etats ouest-européens
Introduction
Nous allons réfléchir autour du thème du développement des
Etats. Question de l’Etat, dissociée du rapport à la Nation et au nationalisme.
Distinction entre l’Etat moderne et l’Etat contemporain. L’Etat moderne est
apparu en Europe occidentale à la fin du Moyen Age et a contribué à structurer
l’Europe. L’Etat contemporain s’est imposé comme une forme d’organisation
particulièrement élaborés, exportée grâce au processus de colonisation. Soit
l’Etat est invoqué comme constituant l’un des fondements de la spécificité
européenne. L’Europe, c’est l’importance de l’Etat. Ou bien débat interne aux
européens : le poids de l’Europe est à l’origine de son déclin, ou ceux qui
estiment que le déclin de l’Europe provient du déclin de l’Etat. On est donc au
cœur de l’histoire de l’Europe avec la question de l’Etat.
I. Définitions de l’Etat
1. Le mot Etat
« Stare » : demeurer. Une des premières occurrences
modernes chez Machiavel, dans le Prince. Etat est un terme générique, République
est plus spécifique. Etat : idée de stabilité, de permanence. Différence entre
Etat et gouvernement : « government » chez les ricains : Etat. Administration :
Gouvernement. Etat : catégories abstraites qui se réfère aux institutions
administratives et politiques. Le gouvernement, c’est le pouvoir exécutif. Forme
d’abstraction qui désigne formes d’institutions ;
2. Trois grandes approches : Marx, Durkheim, Weber
Marx s’interroge sur histoire et fonction, de l’Etat, à
l’époque du capitalisme. L’Etat est au service de laz classe dominante, donc au
service de la bourgeoisie. Censé travailler au service d »e l’inté^rept
général : il s’agit là d’une mystification que les marxistes vont décrypter.
Sociologie du soupçon. L’Etat n’est nullement neutre et indépendant. Nuances :
Gralmsci : la puisance de l’Etat tient beaucoup plus à sa capacité d’influence
culturelle, que l’influence éco. Modification du regard marxiste sur l’Etat.
Indépendance possible de l’Etat. Mais il n’est pas neutre. Il s’agit de dévoiler
les intentions réelles de l’Etat.
Durkheim : Il a peu écrit sur l’Etat. Il s’y est intéressé
de manière marginale. Mais modèle la pensée française surl’etat jusqu’à nos
jours. Théorie durkheimienne : dans les sociétés primitives, solidarités
mécanique : tout écart doit être sanctionné : pas de place pour l’Etat, la
pression est suffisante. Tout change avec les sociétés modernes. Les i ndividus
sont de plus en plus différents. Pour éviter l’anomie, il faut qu’il y ait de la
solidarité organique. Etat : un des organes qui contribuent à cette solidarité
organique. Etat doit satisfaire les besoins fondamentaux de la société et
participer à la cohésion morale. L’Etat a quelque chose de supérieur, il est
quasiment sacralisé. « L’Etat est avant tout un organe de réflexion. C’est
l’intelligence mise à la place de l’instinct obscur ». Instinct obscur : risque
de l’anomie. Etat : intelligence en actes, en réflexion. Plus l’Etat est fort,
plus l’individu est respecté. Il ne menace pas l’individu, il est la garantie de
son épanouissement. Célébration de l’Etat républicain. L’Etat ne fait que
préciser, orienter les sentiments sociaux. Il permet aux hommes de prendre
conscience de leurs intérêts concordant entre eux. « Peuple et Etat un seul
aspect d’une même réalité. L’Etat, c’est le peuole prenant conscience de
lui-même mais une conscience, supérieure, plus claire ».
Weber : Analyse la plus fouillée
de l’Etat. Trois idées :
- L’Etat se caractérise par la spécialisation. L’exercice
de l’autorité relève d’organismes précis.
- Différenciation : l’Etat se différencie d’autres
groupements, par exemple la religion et l’économie : grand mouvement de la
modernité.
- L’Etat, c’est le monopole de la violence physique
légitime. Différencie l’Etat par rapport à toute autre
3. La postérité de l’approche wébérienne
L’analyse la plus séminale, c’est celle de Weber. La
plupart des travaux consacrés à l’Etat se réfèrent à Weber. Charles Tilly et
Norbert Tilly : Macrosociologie historique. S’inscrivent tous deux dans la
postérité wébérienne. Elias : rajoute deux éléments : le monopole fiscal. Il est
l’instrument de l’autocontrainte. A partir de l’Europe, nous avons un mouvement
d’autocontrainte. Etat : agent de diffusion de cette auto-contrainte. Exemple :
interdiction progressive des duels : refoulement des pratiques violentes. 20ème
siècle : rupture et décivilisation.
Tilly : historien et sociologue : Eta défini dans la lignée
wébérienne : il estime que pour atteindre ce monopole de la violence, la guerre
a joué un rôle moteur dans l’évolution de l’Etat : « la guerre a fait l’Etat,
l’Etat a fait la guerre ».
L’Etat moderne : base territoriale plus large que la Cité
Etat. L’Etat est une forme d’organisation qui garantit la sécurité des citoyens,
qui dispose du monopole militaire et de la justice. Il a le monopole d’une
fiscalité, acceptée, ce qui suppose une forme de médiation avec la société.
Cette médiation est parfois conflictuelle. Emergence dès le XVIIIème siècle
d’une opinion publique.
II. Diversité des constructions étatiques et
caractéristiques communes des Etats contemporains.
Les périodisations : On peut distinguer cinq grandes
phase en Europe, qui permettent le passage de l’Etat moderne à l’Etat
contemporain.
- Avant 14 : dans la plupart des pays, l’Etat est
circonscrit, il n’intervient guère en matière sociale.
- Première Guerre mondiale : Exubérance de l’Etat.
Prolifération des fonctions étatiques. Plusieurs caractéristiques : se fait dans
l’urgence et l’improvisation totale ; l’adaptation est difficile techniquement
et d’un point de vue cognitif. Organisation de la mobilisation financière et
monétaire : contradiction des principes fondamentaux du libéralisme.
Mobilisation des moyens, des techniques de la production du commerce, de
l’économie et de la main d’œuvre. L’Etat devient donc omnipotent. Etat
contrôleur, Etat réglementaire, Eta entrepreneur, répartiteur, arbitraire du
social. Multiplication des organismes étatiques. En France, on avait en 14 trois
sous-secrétariats d’Etat. On en créera une vingtaine. Tous les ministères vont
s’étoffer. 281 commissions en 18, il y en avait 5 en 1914. Grande Bretagne :
intervention dans l’Economie : crée des usines de guerre, répartit les matières
premières. 1918 : on a neuf dixièmes des importations achetées directement par
l’Etat. Croissance du nombre des ministères.
- Les années 20 : période contradictoire. Immense
inquiétude des contemporains. L’Etat est trop puissant : il faut revenir à la
situation antérieure, la première Guerre fut un accident de l’histoire. A côté
de ça, le poids des pesanteurs. Dans presque tous les pays, on voit le maintenir
des organismes mi sen place pendant la guerre, en particulier en France.
- Fin des années 20, début des années 30. La Dépression va
de nouveau bouleverser les rapports à l’Etat. On peut mentionner les dictatures
fascistes et nazies. On peut aussi mentionner les démocraties, à la suite
desquelles on peut faire deux réflexions. Les nouvelles théories : 1. La théorie
de la social-démocratie suédoise. C’est la première à s’engager dans un
processus de révision doctrinal. S’engage dans la voie de la réforme :
combinaison action des syndicats et des pouvoirs publics. Cette expérience de la
négociation ne se disséminera qu’après la seconde Guerre Mondiale, par
l’Allemagne. 2. La théorie du corporatisme. Il a une double variante : celui de
type fasciste, et celui de type démocratique. Fasciste : organiser la société à
partir du haut. Corporatisme démocratique : partir du bas à partir des acteurs
pour réguler l’économie et la société. Il s’agit de remettre de l’ordre dans
l’économie, de trouver des formes d’entente entre les classes sociales. Point
commun : rôle important que doit jouer l’Etat. 3. Le planisme. Œuvre de Henri de
Man. Nécessité de planifier l’économie par l’intermédiaire de l’Etat. L’Etat
doit pouvoir limiter l’influence du marché. Rôle central de grand ingénieur de
l’économie et de la société. Grande influence après la Guerre. Un planisme
syndical : c’est au syndicat de jouer un rôle déterminant auprès de l’Etat. Sera
appliqué sous Vichy. Planisme de type socialisme. Deux idées : il faut
planifier, plus centraliser, plus nationaliser. Conversion de la gauche aux
nationalisations : très douloureux : n’auraient servi qu’à replâtrer l’Etat.
Troisèmùe planisme : le planisme de type technocratique, très fort en France,
sous l’influence du groupe X-Crise. Il s’agit par ça de sauver le capitalisme.
Laboratoire de réflexion, mis en œuvre dès après la seconde Guerre mondiale. 4.
Les idées de Keynes. La théorie Générale devient rapidement un best-seller.
Intervention de plus ne plus visible de l’Etat en Europe au cours des années 30.
Intervention dans le domaine économique : stimuler la relance de l’emploi.
Intervention, sur les questions sociales. Gestation de la démocratie sociale.
- 1945 jusqu’à la din des années 70. Croissance
exponentielle de l’intervention étatique. Domaine économique et social.
Les caractéristiques de l’Etat contemporain : Lié à
une forme de représentation populaire insérée dans un cadre national. Détient
des règles de participation populaire. Il a du adopter des institutions de
représentation populaire. Il doit définir plus ou moins clairement les règles de
sélection de ses élites. Habermas : il ne peut y avoir d’Etat contemporain que
dans son lien avec l’espace public. Publicisation continue des actes de l’Etat.
Autre caractéristique : l’Eta contemporain a acquis une exceptionnelle capacité
d’intervention politique et administrative. Appareils d’intervention, de
contrôle et de surveillance. Débat philosophique autour de Foucault : l’Etat
contemporain insère l’individu dans un champ de contrôle. Le paradoxe de l’Eta
contemporain : il est à la fois individualisant et totalisant. Individu pas
déconnecté des réalités étatiques. Autres penseurs : contre-mouvement : tension
permanente avec l’Etat de droit. Ce qui est caractéristique, c’est la tension et
la complicité entre l’autonomisation des individus et la croissance de l’Etat,
au nom de l’égalité des droits. Troisième aspect : l’Etat est devenu un acteur
du processus socio-économique. Travaille la société en permanence. De plus en
plus convoité, organisé par les groupes de pression qui organisent la société.
Il est acteur et sujet. Dialectique du rapport à la social. Dernier point : Etat
appartient à un système international d’Etat. Ses marges de manœuvre sont de
plus en plus limitées.