Aller au contenu du Forum

forum-scpo.com

Le forum des étudiants de Sciences Po


Quelle est la légalité des armes nucléaires ? - Relations internationales - Geopolitique - Droit international

Menu principal


Accueil

Le Forum principal

Tous les forums

Index des meilleures discussions

Mutualisation des travaux étudiants

La petite bibliothèque du forum

Laboratoire des idées et des propositions politiques

Encyclopédie de liens

Le wiki du forum

Les bons plans

Contact

Recherchez

Recherche personnalisée

Les Masters

Les premiers cycles

Les langues

Les préparations aux concours

Concours professionnels et administratifs

Le Forum Helpology

Le Forum de la langue française : PAN !

Forum logement

Stages/jobs/emplois

Annonces diverses

Forum informatique

Le métaforum


Tous les ouvrages de la bibliothèque du forum

Ouvrages d'histoire et d'actualité

Les best-sellers actuels

Les meilleurs ouvrages de droit

Bibliographie financière

Littérature web & computing

Littérature & fictions

Littérature culturelle (arts, musique et cinéma)


Concours Master SciencesPo. 2011

Présidentielle 2012

Linkdump vol. VII

Concours professionnels et administratifs

Nicolas Sarkozy

Concours à BAC +0

Concours CRFPA

Concours master HEC-ESCP (Admission directe)

La crise financière

Perspectives économiques

Réforme des retraites

Hadopi

Linkdump vidéos

Zemmour

Démographie

Séries télé

Les dépeches insolites

Sondages

Finances publiques



Les musiques préférées du forum

Télephones portables et smartphones

Applications mobiles

Les cours de relations internationales du forum des étudiants de Sciences Po

Quelle est la légalité des armes nucléaires ?

 

Suite à la polémique  qu'avait déclenché la reprise par la France de ses essais nucléaires en 1996, la Cour Internationale de Justice avait été saisie d'une demande d'avis consultatif sur la licéité des armes nucléaires; une telle demande d'avis consultatif avait déjà été évoquée depuis 1993 par le mouvement des non-alignés mais les Etats occidentaux avaient auparavant toujours réussi à la bloquer.

C'était un problème fort délicat : comment rendre un avis sur une question aussi délicate sans risquer de s'aliéner soit les puissances nucléaires, soit la majorité des autres Etats représentés à l'Assemblée Générale de l'ONU et qui étaient à l'origine de cette demande ?

 

L'argumentation des Etats favorables à la licéité de l'arme nucléaire (i.e ceux qui la détiennent et leurs alliés) reposait essentiellement sur l'idée que l'arme nucléaire n'est pas en soi différente d'une autre arme et que si son usage n'est pas toujours licite, il n'est limité en droit que par les limites qui s'imposent au recours à la force armée en général. Ces Etats faisaient valoir que l'interdiction d'une arme particulière ne pouvait résulter que d'une convention particulière (comme il en existe par exemple pour les armes bactériologiques et chimiques, ou pour les mines antipersonnel etc.).

 

Les Etats hostiles à l'arme nucléaire faisaient valoir d'une part qu'il y avait un droit général en formation pour le bannissement de l'arme nucléaire (les traités sur les zones exemptes d'armes nucléaires type Tlatelolco, Rarotonga ou le traité sur l'Antarctique) mais plus généralement qu'une arme qui risquait de détruire l'humanité tout entière (ce qu'aucune arme de destruction massive ne pourrait réaliser) serait de soi illicite (thèse à opposer à l'illécéité non de l'arme elle-même mais de certains de ses usages).

 

 La Cour a écarté ces arguments : il n'y a pas de droit positif ou coutumier interdisant l'arme nucléaire. Celle-ci n'a pas besoin d'être autorisée par un traité particulier, mais c'est au contraire à ceux qui prétendent qu'elle est interdite à montrer par quelle norme de droit elle le serait, et le fait qu'on ne l'ait pas utilisée depuis 1945 ne constitue pas une coutume interdisant qu'on l'utilise, mais simplement un heureux concours de circonstances. Pour qu'il y ait coutume il faudrait un élément d'"opinio juris" qui n'existe évidemment pas à partir du moment où un nombre important d'Etats ont entretenu et continuent à bâtir, entretrenir et moderniser des arsenaux nucléaires, sauf à penser qu'ils feraient ces coûteux investissements en étant convaincus qu'il leur est à jamais interdit d'user des matériels en question.

 

Un argument présenté consistait à dire que l'emploi de l'arme nucléaire entraînerait des conséquences écologiques incompatibles avec un certain nombre de normes internationales; mais ces normes sont des instruments juridiques qui sont loin d'être universels, et souvent ne sont pas même des instruments juridiques, mais seulement des déclarations de conférences internationales qui seraient plutôt de l'ordre de la "soft law".

 

Un autre argument consistait à affirmer que l'emploi de l'arme nucléaire serait incompatible avec le droit international humanitaire (qui oblige à distinguer entre combattants et non combattants, cibles légitimes ou non etc : on soutenait à cet égard que quand bien même le tir serait précis, les dommages collatéraux seraient toujours excessifs par rapport aux buts militaires légitimes). A ce sujet la Cour déclare que si l'utilisation des armes nucléaires : "n'apparait guère conciliable avec le respect des exigences des principes et règles du droit international applicable dans les conflits armés", et est même "généralement contraire aux règles du droit international applicable dans les conflits armés, et spécialement aux principes et règles du droit humanitaire" néanmoins elle estime  ne pas disposer pas d'éléments suffisants pour pouvoir conclure avec certitude que l'emploi d'armes nucléaires serait "nécessairement contraire" à ces principes et règles "en toutes circonstances". Autrement dit : certains usages de l'armes nucléaire seraient illicites au regard du droit international humanitaire et d'autres non : cela n'avait rien de  bien nouvea ! Question non résolue : qu'en est-il des armes nucléaires tactiques ou de faible puissance qui n'affecteraient que les combattants et n'auraient pas d'effets significatifs sur l'environnement ?

 

Mais surtout,  le droit à la légitime défense est un droit inhérent et naturel. On ne peut pas déduire du fait que les Etats ont adhéré à certaines normes coutumières ou positives de droit environnemental ou humanitaire qu'ils ont par là entendu se priver du droit à la légitime défense "dans des circonstances extrêmes" où l'emploi d'armes nucléaires s'avèrerait la seule solution.  En d'autres termes, le droit à la survie l'emporte sur tout autre droit ou obligation. La prise en compte des préceptes du droit environnemental ou humanitaire devrait alors se situer dans le contexte d'une problématique de proportionnalité (les dommages causés d'un point de vue humanitaire ou environnemental sont-ils proportionnés à ceux qui seraient encourus si on succombait à la menace ou à l'agression qu'on cherche à repousser ?). En passant, la Cour a refusé de se prononcer sur le point de savoir si les normes du droit humanitaire font partie du "jus cogens", ce qui était sage, car alors ont aurait pu se demander si ce droit primait y compris à la légitime défense.

 

Certains Etats, tiraillés entre leur appartenance au "monde occidental" et leur hostilité viscérale aux armes nucléaires comme l'Australie, tenaient des positions ambigües voire acrobatiques : l'usage d'armes nucléaires serait toujours illégale, mais leur détention aux fins de dissuasion ne le serait pas (on voit mal cependant ce que signifierait la dissuasion résultant de la détention d'une arme dont on aurait pas le droit de ses servir). Cette argumentation se heurtait d'ailleurs à celle d'une partie des Etats hostiles aux armes nucléaires selon lesquels le seul fait de détenir ces armes constituait une menace de recours à la force, prohibée comme telle par le droit international qui n'autorise en principe que le règlement pacifique des différends. La CIJ a d'ailleurs écarté cet argument en faisant valoir que la menace de recours à la force n'est illicite que lorsque le recours à la force serait lui-même illicite (mais en cas de légitime défense, la menace du recours à la force est licite pourvu qu'il soit proportionné à la menace : et quid si la menace est elle-même nucléaire ?). Il est remarquable que la CIJ n'envisage pas la licéité de l'emploi de l'arme nucléaire dans un autre cas que celui de la légitime défense (alors qu'il y a des hypothèses de guerre légitime hors de la cas de la légitime défense, comme par exemple le cas d'une opération mandatée par le Conseil de sécurité, pas forcément dans le cas de la légitime défense : mais la Cour n'envisage pas cette hypothèse).

 

Le paragraphe-clé de la sentence, le 2E (qui n'a été adopté que par la voix prépondérante du président de la CIJ, les juges s'étant partagés en nombre égal) affirme que "Au vu de l'état actuel du droit international ainsi que des éléments de fait et de droit dont elle dispose, la Cour ne peut cependant conclure de façon définitive que la menace ou l'emploi d'armes nucléaires serait licite ou illicite dans une circonstance extrême de légitime défense dans laquelle la survie même de l'Etat serait en cause". Dans ces conditions, et compte tenu de ce qu'en droit international les limitations à la souveraineté ne se présument pas, tout ce qui n'est pas interdit étant autorisé, il faut en conclure que la CIJ n'a pas déclaré l'arme nucléaire illicite, même si elle affirme que dan certains cas cet usage serait illicite (ce que de toutes façons on savait déjà). Pourtant il faut bien reconnaitre que le concept de "circonstance extrême de légitime défense", qui n'est défini nulle part en droit international donne plus la mesure de l'ambigüité de l'arrêt que celle de la liberté qu'aurait un Etat d'utiliser les armes nucléaires. La Cour dit en fait qu'on a sans doute le droit de les utiliser, mais dans des circonstances dont personne ne sait exactement ce qu'elles sont. C'est ce qui a fait dire à un des juges dans son "opinion dissidente" (et sur cette arrêts, tous les juges en ont émis) que "La Cour aurait été bien avisée de refuser d'emblée de donner un quelconque avis en l'espèce. Le fait qu'elle n'ait pu parvenir qu'à cette conclusion équivoque n'est pas de nature à renforcer sa crédibilité". Et le fait est que la Cour renvoie en quelque sorte les Etats à leur responsabilité en indiquant qu'elle n'est pas législateur international "La Cour ne ouvait à l'évidence pas aller au-delà de ce que le dit le droit. Elle ne pouvait pas dire ce qu'il ne dit pas", et par suite elle invite la communauté internationale "à corriger les imperfections d'un droit international qui n'est en dfinitive que la création des Etats eux-mêmes". On peut toutefois faire un reproche à cet avis consultatif : la Cour n'a guère recherché à identifier des scénarios dans lesquels l'usage de l'arme nucléaire serait licite et d'autres dans lequel il serait illicite, hors les cas dans lesquels tout recours à la force armée serait illicite. Tout ce qu'on peut dire à ce stade c'est que l'emploi de l'arme nucléaire est considéré comme possiblement licite à la condition d'être 1) défensif et 2) proportionné et nécessaire à l'agression ou à la menace dont on se défend. Et encore nombre d'hypothèses restent-elles sans réponse comme par exemple : la Cour ayant dit que l'usage de telles armes serait licite dans le cas d'un Etat luttant pour sa survie même, cela signifie-t-il qu'il ne serait pas licite dans le cas de la légitime défense d'autrui (cas de la légitime défense collective) ?

 

Enfin il y a dans l'avis consultatif de la CIJ un point qui suscite d'autres polémiques  : c'est l'affirmation selon laquelle "Il existe une obligation de poursuivre de bonne foi et de merner à terme des négociations conduisant au désarmement nucléaire dans tous ses aspects, sous un contrôle international strict et efficace". Ceci est contestable parce que s'il existe effectivement dans certains cas une obligation de négocier (en l'occurrence posée par l'article VI du TNP) il n'existe pas d'obligation de résultat : il n'y a pas d'obligation d'aboutir et d'ailleurs on voit mal ce que serait la sanction juridique de l'inexécution de cette obligation.

 

De toutes façons on se souviendra qu'un avis consultatif de la CIJ n'est pas une norme du droit international public positif. Il ne s'impose qu'aux Etats qui l'acceptent.

Message du forum : Attention, ne copiez pas cette fiche pour la rendre comme votre travail, ce n'est ni utile pour apprendre, ni honnête. De nombreux outils de détection du plagiat existent et vous serez donc détectés par votre professeur. Servez-vous en plutôt comme outil d'apprentissage, d'approfondissement ou de révision.