La loi Sarbanes-Oxley et la loi de Sécurité financière

 

Pour répondre aux scandales qui ont explosé à la Une de l’actualité de 2001-2002 (Enron, Worldcom, Tyco, etc.), le Congrès américain et la Securities and Exchange Commission (SEC)[i] ont établi en juillet 2002 un nouveau corps de réglementations, visant à prévenir les dérives des patrons et des CA des grandes entreprises, la loi Sarbanes-Oxley[ii].

 

La loi Sarbanes-Oxley

 

            L’objectif de cette loi est de restaurer la confiance des investisseurs dans les marchés des capitaux américains, de redorer le blason du capitalisme à l’américaine. La loi Sarbanes-Oxley met en place un renforcement du processus de contrôle interne de l’entreprise, notamment au travers de ses articles 302 et 404, relatifs à la certification des états financiers et au système d’évaluation du contrôle interne. Le contrôle interne est défini par l’Ordre des experts comptables français comme « l’ensemble des sécurités contribuant à la maîtrise de l’entreprise. Il a pour but, d’un côté, d’assurer la production, la sauvegarde du patrimoine et la qualité de l’information, de l’autre, d’assurer l’application des instructions de la direction et de favoriser l’amélioration des performances. Il se manifeste par l’organisation, les méthodes et procédures de chacune des activités de l’entreprise pour maintenir la pérennité de celle-ci ».

3 grands axes structurent la loi Sarbanes-Oxley :

 

1. Exactitude et fiabilité de l’information :

Elles sont garanties grâce à un contrôle régulier de la SEC sur les sociétés cotées. Par souci d’amélioration de l’accès et de la fiabilité de l’information, les entreprises doivent fournir à la SEC des rapports détaillés fournissant des informations complémentaires (principes comptables guidant la présentation des comptes, transactions hors bilan, changements dans la propriété des actifs détenus par les dirigeants, codes d'éthique de l'entreprise…). Enfin, pour contrôler le travail des auditeurs, et les poursuivre en cas de non respect des normes, est créé le Public Company Accounting Oversight Board, organisme dépendant de la SEC.

 

2. Responsabilité des gestionnaires :

Les principaux dirigeants de la société (CEO et CFO – Chief Executive Officers et Chief Financial Officers) agissent sous serment (certification des comptes –article 302) ce qui les expose à des poursuites pénales en cas de non-conformité des chiffres certifiés aux chiffres réels (amendes et peines de prison pouvant aller jusqu’à 20 ans notamment si la falsification est intentionnelle). Cela permet de lutter, entre autres, contre la comptabilité dite « créative ».

 

3. L’indépendance des vérificateurs 

Sont prévues la création d’un comité d’audit composé à 100% d’administrateurs indépendants, superviseurs du processus de contrôle interne (et de la mise en place de ses procédures, cf : article 404) ainsi que la mise en place de règles d’audit garantes de la confidentialité des observations des employés et des actionnaires relatives à la comptabilité de l’entreprise. Une rotation des auditeurs externes est instaurée, permettant ainsi la réduction de conflits d’intérêts et empêchant les auditeurs de fournir d’autres services que celui de la vérification des comptes. Même si elle met accroît la transparence dans la relation entre les marchés financiers et les entreprises, la loi pose plusieurs problèmes. Malgré le fait que les entreprises aient été dès la promulgation de la loi très enthousiastes et qu’elles aient très vite développé les processus et les structures requis par la loi, les sociétés appellent depuis 2003 à un assouplissement des règles et des marges de manœuvres concernant les cabinets d’audit. Ensuite se pose le problème de la portée extra-territoriale de la loi. Les Etats-Unis ont été les premiers à réagir par une loi à la situation des années 2001-2002, ce qui fait de ce texte une référence internationale, d’autant plus que les Etats-Unis voient plusieurs grandes entreprises étrangères cotées sur leurs marchés. Le droit américain rentre donc en conflit avec le droit de chaque pays. Cependant, pour tenter d’uniformiser la réglementation internationale, certains pays comme la France ont promulgué des lois « clones », voire plus strictes que la loi Sarbanes-Oxley.

 

La loi de Sécurité financière

 

         La loi de sécurité financière (LSF) du 1er août 2003  tire directement son influence de la loi Sarbanes-Oxley. En effet, l’intégration et la volatilité des marchés boursiers sont telles que de nombreuses sociétés étrangères sont cotées aux Etats-Unis, ce qui les soumet automatiquement à la loi américaine. De plus, les scandales financiers avaient eu un impact sinon économique au moins médiatique en France et dans le monde. Néanmoins la portée de la loi Sarbanes-Oxley en France doit être atténuée : certes, lors des travaux préparatoires, elle sera citée à titre d’exemple mais uniquement dans un souci de démarcation : en effet elle était depuis quelques temps déjà une préoccupation du droit communautaire1. A l’instar de la loi Sarbanes-Oxley, la loi de Sécurité financière se focalise autour de trois impératifs : sécurité, transparence et contrôle de l’information. Ces règles de conduite s’appliquent aux divers acteurs des marchés financiers : analystes financiers, agences de notation et dirigeants des sociétés. Son but ? Restaurer la confiance.

 

1. Les analystes financiers

Il existe des analystes financiers appelés les « sell-side » (par opposition aux « buy-side ») qui collaborent aux activités de banques d’investissement et de courtage de titres et qui rendent publiques leurs analyses. On comprend aisément que leur position est au centre d’un conflit d’intérêt puisqu’ils jouent à la fois le rôle de contrôleur et de banquier de la société. D’ailleurs, lors de l’éclatement de la bulle Internet des enquêtes[iii] ont révélé que certains de ces « sell-side » avaient publié des comptes biaisés par leurs intérêts de banquiers. Dans ce cadre, la LSF reconnaît désormais l’activité d’analyse financière et non plus seulement la personne qui l’exécute : de ce fait cette dernière peut dorénavant être une personne morale. De plus, sur l’analyse doivent figurer les éventuels liens entre son auteur et la société analysée.

            La LSF reconnaît le pouvoir réglementaire de l’AMF (Autorité des Marchés Financiers), fusion de la COB (Commission des Opérations de Bourse) et du CMF (Conseil des marchés financiers) ainsi que son pouvoir de sanction et de contrôle. Néanmoins les différents amendements posés déçoivent ceux (en premier lieu les analystes financiers eux-mêmes) qui voyaient en la LSF un outil de réglementation de la profession ; en réalité, le pouvoir de l’AMF n’est que très peu explicité et son travail d’émissions de règles de conduite ne s’en trouve que plus difficilement atteignable.

 

2. Les agences de notations

On se trouve ici en « terra incognita[iv] ». Alors même qu’avec les commissaires aux comptes, les agences de notation sont désignées par l’opinion publique comme coupables des scandales, la LSF ne constitue qu’un timide début de réglementation. Ainsi elle dote le marché d’une autorité (l’AMF), réforme le statut des commissaires aux comptes mais ne s’intéresse que de très loin aux agences de notation. Désormais, chaque année, l’AMF publie un Rapport sur les agences de notation, leurs règles déontologiques, la transparence de leurs méthodes et l’impact de leurs activités sur les émetteurs et les marchés financiers.

 

3. Les nouvelles obligations d’informations des dirigeants envers les actionnaires et le marché

     -  C’est sans contexte le plus gros chantier de la LSF puisque la transparence des décisions des dirigeants participe de la restauration de la confiance du public envers les marchés. L’article 117 de la LSF dispose que  «  le président du conseil d’administration rend compte dans un rapport […] des conditions de préparation et d’organisation des travaux du conseil ainsi que des procédures de contrôle interne mises en place par la société. » De plus, le nouvel alinéa 3 de l’article 225-37 du Code du commerce donne aux actionnaires une connaissance précise du fonctionnement du conseil d’administration ou de surveillance (notamment concernant la rémunération des dirigeants et avantages de toutes natures) et un accès aux méthodes de contrôle interne qui permettent d’assurer la fiabilité des informations financières. Par ailleurs, les montants des honoraires versés à chacun des commissaires aux comptes doivent être mis à la disposition des actionnaires. En cas d’absence de rapport ou d’informations, c’est l’AMF qui fixe les sanctions. La LSF est donc le premier texte à donner un outil concret en matière de gouvernement d’entreprise.

     -  La LSF s’intéresse également au marché. Dans ce cadre, l’AMF a pour mission de « veiller à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers et tout autre placement donnant lieu à l’appel public à l’épargne ». L’autorité devient « magistère du gouvernement d’entreprise » car c’est elle qui met en place les modalités de publicité des informations (envers elle et le marché), c’est elle qui sanctionne en cas de manquement aux règlements (manque de transparence sur le fonctionnement interne, sur la répartition du capital, les opérations sur titres et les objectifs).

 


 

[i]Organisme fédéral créé en 1934 qui a pour objectif principal de veiller à ce que les entreprises agissent de manière responsable vis-à-vis des actionnaires, notamment en leur donnant accès à des informations financières et comptables fiables et transparentes.

 

[ii] Votée le 22 juillet par le Congrès, elle est ratifiée le 30 du même mois par G. W. Bush. Cette loi tire son nom de ses deux promoteurs, le sénateur démocrate Paul Sarbanes et le représentant républicain Michael Oxley.

 

[iii] Courant 2000- 2001, les « sell-side » ont notamment été mis en accusation par le Procureur général de l’Etat de New-York, Eliot Spitzer pour avoir biaiser certaines analyses financières.

 

[iv]   Philippe Houillon, Rapport de la commission des lois, Assemblée nationale avril 2003.

 

 

 

 

Bibliographie :

 

  • Revue des Sociétés ; Sécurité et droit des affaires après la loi de sécurité financière. Dalloz, oct.- dec. 2003
  • Revue française de gestion ; Contrôle externe modalités et enjeux. Lavoisier, nov. – dec. 2003
  • Dossier de presse ; Rapport annuel de l’Autorité des Marchés Financiers 2003
  • Rapport A la rescousse du capitalisme américain : la loi Sarbanes-Oxley,  de Michèle Rioux, pour l’Observatoire des Amériques, Janvier 2003

 

 

[1]Organisme fédéral créé en 1934 qui a pour objectif principal de veiller à ce que les entreprises agissent de manière responsable vis-à-vis des actionnaires, notamment en leur donnant accès à des informations financières et comptables fiables et transparentes.

 

[1] Votée le 22 juillet par le Congrès, elle est ratifiée le 30 du même mois par G. W. Bush. Cette loi tire son nom de ses deux promoteurs, le sénateur démocrate Paul Sarbanes et le représentant républicain Michael Oxley.

 

[1] Courant 2000- 2001, les « sell-side » ont notamment été mis en accusation par le Procureur général de l’Etat de New-York, Eliot Spitzer pour avoir biaiser certaines analyses financières.

 

[1]   Philippe Houillon, Rapport de la commission des lois, Assemblée nationale avril 2003.

Bibliographie :

 

  • Revue des Sociétés ; Sécurité et droit des affaires après la loi de sécurité financière. Dalloz, oct.- dec. 2003
  • Revue française de gestion ; Contrôle externe modalités et enjeux. Lavoisier, nov. – dec. 2003
  • Dossier de presse ; Rapport annuel de l’Autorité des Marchés Financiers 2003
  • Rapport A la rescousse du capitalisme américain : la loi Sarbanes-Oxley,  de Michèle Rioux, pour l’Observatoire des Amériques, Janvier 2003

 

 

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